Le Billet Vert #2 - Énergie Partagée: investir dans un portefeuille de projets d’énergie renouvelable citoyens
Un exemple de modèle alternatif qui associe impact local et rentabilité
Temps de lecture: 8 minutes
Hello Hello et Happy Friday!
Je suis ravi de vous accueillir pour cette 2ème édition du Billet Vert. Je tenais avant toute chose à vous remercier pour vos nombreux retours positifs et suggestions qui aideront à améliorer la qualité de cette Newsletter.
Lors de la première analyse, nous avions parlé d’Earthwake, entreprise française en collecte sur Wiseed qui transforme les déchets plastiques en carburant. Si vous ne l’avez pas lue, vous pouvez la retrouver ici.
Pour rappel, un petit ❤️, un partage , du bouche à 👂 aident grandement à faire connaître cette Newsletter qui a pour but d’aider le plus grand nombre. Merci d’avance pour votre soutien!
Aujourd’hui, on va aborder le sujet de l’énergie renouvelable sous l’angle de l’impact local et du portefeuille d’investissements avec Énergie Partagée (aussi écrit E.P dans cette analyse). J’ai décidé d’y investir 1 030€ (mon plus gros montant sur du non-coté).
Dans le plan France 2030 érigé par Emmanuel Macron en octobre 2021, 30 milliards d’euros seront déployés en 5 ans notamment pour favoriser l’émergence des énergies renouvelables sur notre sol. Elles représentaient 19,1% de notre mix énergétique en 2020 mais devraient atteindre 33% en 2030. On est encore loin du compte, d’autant plus que la France est le seul pays parmi les 27 de l’UE à ne pas avoir atteint ses objectifs pour 2020. Elle se classe 17ème très loin derrière les pays Scandinaves.
Il paraît donc urgent d’encourager cette filière, d’autant plus dans le contexte de dépendance énergétique actuel qui nous prouve Ô combien il est important de disposer d’une souveraineté sur ce sujet. Même si le nucléaire devrait également avoir sa place dans l’énergie de demain, rappelons tout de même qu’elle nécessite de l’uranium, dont 45% de la production mondiale en 2021 est fournie par un seul pays: le Kazakhstan. L’avantage comparatif des énergies renouvelables est que leur production dépend uniquement des conditions climatiques présentes sur le territoire. Elles peuvent certes être aléatoires, d’où le besoin de construire un parc diversifié d’un point de vue sectoriel et géographique.
C’est justement la logique d’investissement portée par Énergie Partagée. Associés à une approche citoyenne et locale, leur modèle et leurs valeurs m’ont convaincu. Pour étoffer l’analyse, j’ai eu le plaisir d’échanger avec Marc Mossalgue, Responsable de la communication chez Énergie Partagée.
Ce que vous allez apprendre dans cette analyse:
Note Globale: 7,09/10 - détails disponibles sur mon portefeuille
Énergie Partagée: sa création, son évolution, ses engagements
La diversification sectorielle et géographique au coeur du modèle d’Énergie Partagée
Analyse de l’impact via le triptyque volonté, contribution et mesure
Investir dans Énergie Partagée: un modèle atypique de valorisation des actions à l’écart de la spéculation
Comment revendre ses parts Énergie Partagée?
Pourquoi j’y ai investi 1 030€
Les détails et conditions de l’investissement
Mais c’est quoi Énergie Partagée?
Énergie Partagée est une société commerciale fondée en 2011, dont le but initial était de se substituer à l’(in)action gouvernementale en favorisant l’accélération des énergies renouvelables via le développement de projets locaux citoyens.
Un projet local citoyen est un projet dans lequel les habitants et les territoires (i.e les collectivités locales) sont majoritaires au financement et à la gouvernance. Cela s’oppose aux projets portés par des promoteurs qui généralement louent le terrain à la collectivité sans partager les gains issus de l’exploitation des énergies renouvelables qui y sont installées.
À l’origine, 3 types d’acteurs ont décidé de mettre leurs compétences en commun autour d’une charte qui servira de ligne conductrice à cette initiative.
Ce mouvement réunissait:
des groupes de citoyens locaux qui lançaient leurs projets et qui souhaitaient la création d’une structure pour les défendre.
le réseau de la transition énergétique comme HESPUL ou CLER pour les accompagner sur les questions techniques et réglementaires.
les banques solidaires, à l’instar de La Nef et du Crédit Coopératif, pour apporter le financement nécessaire.
L’objectif était surtout de former les porteurs de projets pour les aider à les concrétiser en réduisant au maximum le risque d’échec. C’est toujours la mission que se donne Énergie Partagée à travers sa branche coopérative.
Ce n’est que plus tard que la volonté de collecter l’épargne citoyenne est née à travers la création d’une structure d’investissement.
Source: Énergie Partagée
Dans les premières années, le prix des actions Énergie Partagée restait inchangé. Les investisseurs avaient donc une approche militante qui n'accordait pas d’importance à la rentabilité.
Depuis 2017, poussé par le besoin d’attirer plus d’investisseurs pour financer un nombre croissant de projets, ces actions sont revalorisées annuellement en offrant une rentabilité raisonnable (+3,6% en 2020 et +4% en 2021).
En juillet 2022, Énergie Partagée comptait au total 6 800 actionnaires ayant versé 33 millions d’euros.
Varier les sources d’énergie et leurs localisations pour mutualiser les risques
Notation des risques: 6,5/10 (1/10: très risqué et 10/10: très peu risqué)
Solidité économique et financière: 7/10
Dans son procédé de sélection de projets, Énergie Partagée ne finance que ceux présentant une viabilité économique à terme. Il sont réévalués tous les ans et reflétés dans la performance du portefeuille.
Les producteurs d’énergie bénéficient de prix de vente garantis par des contrats longue durée.
Sur 110 projets financés, aucun n’a jamais fait faillite. Le pire qu’il soit arrivé est un retard dans le lancement, ce qui réduit légèrement la rentabilité globale.
Les revenus d’Énergie Partagée sont générés à partir des:
remboursements de projets avec une valorisation plus élevée
dividendes, perçus une fois que la dette bancaire a été remboursée (généralement au bout de 10 ans).
frais d’entrée lorsque nous investissons.
En plus d’un modèle robuste qui a fait ses preuves depuis sa création, j’ai particulièrement aimé cette diversification géographique permettant d’investir facilement dans une centaine de projets répartis sur tout le territoire français. J’ai vraiment eu le sentiment que mon argent allait servir au plus grand nombre et aura un impact à l’échelle nationale.
J’ai eu la chance d’échanger avec leur directrice financière qui m'a expliqué qu’Énergie Partagée présentait un chiffre d’affaires en croissance constante et dégageait des bénéfices. Les prochains résultats seront publiés le 28 octobre mais devraient confirmer cette tendance.
👉 Ces éléments indiquent généralement une entreprise en bonne santé.
Répartition géographique:
Source: Énergie Partagée
Risque actuel principal : 6/10
Le risque est concentré sur deux activités principales: l’éolien et le photovoltaïque (80% des montants investis). Ce sont les deux technologies les plus productives, d’où un plus grand nombre de demandes de financements. Énergie Partagée s’accorde le droit d’en décliner si cela devait trop les exposer à une énergie ou une région en particulier.
Répartition de l’exposition par énergie:
Source: Énergie Partagée
Risques futurs: 4/10
Malgré la mutualisation des risques, l’augmentation actuelle des taux bancaires a pour effet d’accroître le coût des emprunts et donc de diminuer la rentabilité potentielle des projets dans lesquels E.P investit. De plus, la situation géo-politique fait pression à la hausse sur les prix des matériaux et donc des panneaux solaires. Les deux cumulés ont conduit à un plus grand nombre d'abandons de projets.
Marc m’expliquait que les développeurs - ceux qui investissent tôt dans dans ces projets - ne cédaient plus leurs parts une fois la phase dérisquée atteinte. Auparavant, il était possible de leur racheter mais ces derniers ont compris qu’ils pouvaient en tirer une meilleure rentabilité en les conservant.
Phase dérisquée: aussi appelée phase de chantier, il s’agit de l’étape où les études de faisabilité ont déjà été réalisées, le permis de construire et tous les autres recours obtenus.
Cette phase s’oppose à celle dite de développement qui se trouve en amont et dont l’issue est par nature beaucoup plus incertaine.
👉 E.P se retrouve quelque peu forcé à investir dans des projets moins matures, ce qui représente un risque d’échec ou de retard plus élevé. Leur objectif est de faire passer la part de leurs investissements dans des projets au stade de développement de 5% à 10%.
🚨 Ce chiffre reste assez marginal pour le moment, mais la tendance est à l’augmentation donc c’est une variable à suivre.
🚨 Leur difficulté principale sera donc de trouver des projets à financer dans un marché qui semble se resserrer, pour déployer leurs liquidités et continuer d’apporter une rentabilité à leurs investisseurs.
À partir des éléments ci-dessus, je lui donne la note de risque de 6,5/10 (1/10: très risqué et 10/10: très peu risqué) mais elle est amenée à changer en fonction de l’évolution de leur concentration d’exposition sur l’éolien et le photovoltaïque ainsi que de la part de leurs investissements à la phase de développement.
Analyse via le triptyque de l’impact: volonté, contribution et mesure
Je vous propose aujourd’hui une autre approche de l’impact. Avoir des indicateurs pour l’évaluer est indispensable (même si on peut faire dire ce qu’on veut aux chiffres), mais plus important encore est la cohérence entre la volonté et l’action. Et je dois dire que sur ce point j’ai été bluffé par l’engagement d’Énergie Partagée.
Volonté: 10/10
L’histoire même de sa création et de son développement sont la preuve d’une volonté d’impact écologique. Les premiers acteurs derrière cette initiative se sont battus pour mener à bien leur mission, à une époque où le cadre juridique y était alors défavorable.
L’approche citoyenne et locale, qui se veut unique à cette échelle sur le marché de l’énergie, prouve aussi l’intention de donner le pouvoir aux mains des collectivités et de ses habitants.
Au-delà de ses investissements, E.P marque encore plus sa volonté par l’accompagnement qu’ils offrent aux apporteurs de projet via leur association. Ils fournissent les ressources techniques et leur expertise pour optimiser les chances de succès.
Ils se fixent également un objectif de 15% d’énergie renouvelable citoyenne en 2030.
Contribution: 10/10
E.P a créé son propre label “Énergie Partagée” qui distingue les démarches locales et citoyennes d’énergie renouvelable.
Énergie Partagée est labellisée Finansol, réputé comme étant le plus crédible pour illustrer le caractère solidaire d’un produit financier.
Les multiples chartes rédigées pour encadrer les codes de construction des projets: par exemple, ne pas raser une forêt pour y installer du solaire, s’assurer qu’il y ait des passages à poissons au sein des barrages hydroélectriques ou encore l’application de principes stricts pour les méthaniseurs.
Mesure: 8/10
Malgré le fait qu’ils publient beaucoup d’indicateurs, il manque une information cruciale: l’économie en termes de CO2.
Cependant:
Les projets citoyens et locaux permettent aux collectivités d’engranger 2 à 3 fois plus de recettes que lors d’un développement tierce qui ne paie que des taxes et loyers.
353 GwH d’énergie produite attendue en 2022, soit l’équivalent de la consommation de 294 000 personnes.
34% des retombées d’un projet citoyen sert à la création d’emplois locaux alors que cet impact n’est pas garanti lorsqu’il s’agit d’un projet privé/professionnel.
Investir dans Énergie Partagée: un modèle atypique de valorisation des actions à l’écart de la spéculation
… et c’est justement ce que j’ai aimé! Le cours des actions n’est pas déterminé par rapport à un marché où se rencontreraient une offre et une demande.
À la place, le prix de l’action:
est voté pour l’année à venir en AG qui a lieu en novembre, le protégeant ainsi des pratiques spéculatives. C’est donc c’est un bon timing pour investir maintenant si vous pensez que la valeur des titres va augmenter.
est défini sur la base de plusieurs critères comme la performance des projets, l’inflation, le taux de livret A et d’autres encore.
Lors d’un sondage réalisé auprès de leurs actionnaires en 2021 (donc avant les événements de cette année), ces derniers ont répondu qu’ils attendaient une rentabilité autour de 3-4%/an sur ce type de placement.
Voyez ci-dessous l’évolution du cours dans un contexte où le livret A était à 0,75%:
Source: Énergie Partagée
🚨 le prix peut très bien baisser si leurs investissements perdaient en valeur, mais c'est contraire à leur logique financière, puisque c'est la durée d'investissement qui en maximise le rendement.
Comment revendre ses parts Énergie Partagée?
Liquidité: 5/10
Que vaut la rentabilité des actions sans la possibilité de les vendre? La réponse: rien!
Énergie Partagée l’a bien compris et propose donc une fenêtre de liquidité tous les ans à leurs actionnaires. Le process est le suivant:
1. Faire la demande avant la clôture de l’exercice en cours, i.e le 30 juin.
2. Demande validée lors de l’AG annuelle de novembre - aucune demande n’a jamais été rejetée jusqu’à présent.
3. Paiement dans le mois qui suit.
👉 🚨 Il y a donc un décalage de 5-6 mois (minimum) entre le moment où vous demandez à vendre vos actions et celui où vous recevez l’argent sur votre compte.
👉 La loi oblige Énergie Partagée à conserver en permanence 2 millions d’euros pour satisfaire les demandes de sortie de leurs actionnaires.
Pourquoi y avoir investi 1 030€ (mon plus gros montant en actions non-cotées)?
J’ai rarement vu autant d’engagement et de militantisme dans un projet. Il y a une vrai cohérence entre ses origines, ses valeurs, son modèle et ses actions.
Un secteur prioritaire pour la transition énergétique que je souhaitais soutenir
Un modèle d’investissement robuste et diversifié soutenu par une structure financièrement solide.
Je n’avais pas d’investissement en cours sur les énergies renouvelables, C’est une excellente façon de prendre un risque mesuré sur un panel large de projets. Je pourrai toujours compenser l’exposition au photovoltaïque et à l’éolien en investissant directement dans des projets de méthanisation ou d'hydroélectricité.
Rentabilité raisonnable mais compétitive.
Une forme de liquidité garantie que je trouve rassurante même s’il y a un délai.
DÉTAILS ET CONDITIONS DE L’INVESTISSEMENT
Les titres sont des actions, valorisées actuellement à 114,40€ par action.
La collecte de fonds d’Énergie Partagée reste ouverte en permanence. Vous pouvez donc décider d’investir (ou réinvestir) quand ça vous chante.
Investissement minimum d’une action.
Le secteur de l’énergie bénéficiant déjà de prix subventionnés, il n’est pas possible d’obtenir la défiscalisation de 25% sur l’IR (ni le sourire de la crém-IR). En revanche, vous pouvez investir via votre PEA, vous permettant de payer 17,2% de prélèvements sociaux sur les plus-values au lieu de 30% de flat tax. Vérifiez les conditions de votre PEA et les frais de gestion éventuels.
Si vous investissez en direct dans Énergie Partagée: frais unique à l’entrée de 3% du montant avec un minimum de 5€ pour la souscription d’une action. Il n’y a aucun frais de gestion ni lors de la revente des titres.
Vous souhaitez en savoir plus sur Énergie Partagée?
Le site d’Énergie Partagée est TRÈS complet (peut-être même trop). Si vous avez encore des questions, je vous recommande d’aller y jeter un oeil ou bien vous pouvez me les poser directement.
Leur FAQ est également très bien faite.
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